mardi 11 septembre 2012

Un 11 septembre sans crash


 J'ai des marottes. Des fidélités, disons.
Parce que, grand ado, tournaient auto-reverse, dans mon walkman les cassettes de Springsteen, Newman, Dylan, Cowboy Junkies et Steve Forbert, je ne peux lâcher l'affaire comme ça. Je les suis.

Pour Springsteen, il a fallu depuis traverser des désillusions insoupçonnées alors (Human touch, working on a dream...). Pour Randy Newman, il a fallu avaler Faust, et surtout s'armer de patience. Les Cowboy Junkies ont sévèrement perdu pied fut un temps avant de bien raccrocher dernièrement jusqu'à ce merveilleux album sorti en début d'année. Dylan a vite merdé avec "Under the red sky", pour revenir à petits pas vers l'excellence... Quand à Forbert, après deux merveilles en 1995 (un album studio, une live génial "Be here now, solo live 1994"), la suite a été moyenne, pas terrible, puis catastrophique... Je perdais un compagnon de route.

En ce 11 septembre sortent deux albums de cette petite bande là, celle de mes copains de l'auto reverse.

 Dylan lâche son Tempest, impérial. Un album pépère, moins inventif que "Modern times" mais vraiment réussi de bout en bout, sans déchet. Un Dylan très bien chanté, ce qui n'est pas toujours le cas : la voix est magnifique. Un  Dylan totalement smooth, empruntant, comme au bon vieux temps ses mélodies à des traditionnels et les emmenant ailleurs, pendant 7 ou 14 (!) minutes : Dylan !


Mais le fait que le Dylan soit bon n'est qu'une demi-surprise. Que le nouveau Forbert, en revanche, soit impeccable en voilà une ! Son talent n'est pas éteint ! J'aime le songwriting de ce gars au delà de la raison  alors, à chaque fois, je pars enthousiaste et, depuis 17 ans, c'est de pire en pire à chaque fois... Des albums sans inspiration, mal produits, trop "rock", trop FM, avec des synthés, des rock'n' roll grassouillets indignes... Le précédent album étant vraiment tout pourri...

 Alors là ! Alléluia au plus haut des cieux, je suis aux anges de le retrouver à ce niveau ! "Over with you" est nettement son meilleur album studio depuis "Mission of the crossroad palms" !  Un album que je devrais faire tourner un paquet de fois tellement je suis en manque de ballades forbertiennes. Sens de la mélodie retrouvé, voix toujours aussi tordue et fragile, belle production sobre :  ça fait plaisir de retrouver son vieux copain...

J'en profite pour ressortir ma théorie fumeuse : Forbert est le plus grand songwriter pour "walkman", point barre ! Comprendront ceux qui ont écouté Forbert dans leur bon vieux walkman autoreverse, en arpentant n'importe quelle rue, n'importe quel chemin, à la ville, en campagne, sous la pluie, la neige, sur et sous les ponts, la nuit, le jour, autoreverse, on repart.


11 septembre et les deux tours de mes CD de ces deux là s'élèvent aujourd'hui un peu plus haut, stables et belles.

http://www.deezer.com/music/steve-forbert/over-with-you-5548731

mercredi 5 septembre 2012

Un chatouilleux pinceau mal placé

"Plus que l’écriture blanche, une écriture transparente, un non-style revendiqué ou assumé qui, pour le coup, contraste avec celui, devenu classique, du plus lyrique des écrivains contemporains. Sans doute, ceux qui pensent encore qu’il faut impérativement un style (une langue disent-ils parfois) pour faire de la littérature - comme ils pensent sans doute qu’il faut un bon coup de pinceau pour faire de la peinture - trouveront-ils ce livre plat, voire indigne, insuffisamment littéraire." écrivait Sylvain Bourmeau dans sa critique du premier romain d'Aurélien Bellanger dans Libération, le 22 août 2012.

 "Sans le recours au beau style. Sans le paravent de l'esthétique." (Nicolas Demorand à propos du denier bouquin d'Angot, Libération, le 3 septembre)

Voilà mis en évidence, l'inanité du discours de certains journalistes se prenant un peu vite pour des critiques littéraires, parce qu'ils ont un copain Michou, un avis sur le livre qu'ils viennent de lire et de comprendre (certains font un peu mal à la tête).
Et ce discours là, celui du journaliste improvisé critique littéraire, inonde cette rentrée littéraire dans la presse.
Le premier à en faire les frais est Laurent Binet dont le dernier livre  -les journalistes le pensent, en sont sûrs - serait aussi, négativement cette fois-ci, insuffisamment littéraire (cf Libé, le Monde, Les Inrocks où Audrey Pulvar, certainement en manque de grain de sel depuis son départ de chez Ruquier s'y met aussi en édito). Il manque des négations, c'est ça ? Ce n'est pas un "roman" ? (car pour bien de ces gens là, littérature = roman, car déjà, bien sûr, la littérature, est limitée aux livres). Parce que le sujet est politique, l'avis du journaliste politique peut supplanter celui du critique littéraire, allons-y les amis.


Il y aurait donc une jauge journalistique qui permet d'évaluer le taux de littérarité en fonction de la quantité de "langue" utilisée pour produire de la littérature.

Je me pince.
/ peu d'effet /

Je me bouffe une couille.
/ on repart /


"il faut impérativement un style (une langue disent-ils parfois) pour faire de la littérature - comme ils pensent sans doute qu’il faut un bon coup de pinceau pour faire de la peinture"

La langue n'est pas un outil en littérature, pas un truc avec un petit manche en bois et du poil au bout, pas un truc japonais qu'on déplie pour masquer un bout de fesse non plus. La langue EST la littérature et la littérature EST la langue. Il n'y a de littérature que dans la langue, par la langue, de la langue. Il ne peut se concevoir de littérature hors de la langue.  
Un steak est fait de viande.

Je ne sais pas ce que vaut ce bouquin de Bellanger, qui me fait peu envie, mais même sa "transparence" (putain, déjà qu'on se fadait l'écriture blanche chiante comme un cul de laitière) est une langue en soi, un style et non un "non-style". Il est possible (mais rien n'est jamais sûr) que je ne l'aime pas plus que celle, toute bien pourrie, du mou Michel, mais loin de moi l'idée de lui refuser le statut de "langue", bien au contraire.
Pour Bourmeau, Demorand (et consorts*), le style, la langue ne peut être qu'artifice, joliesse... Évidemment, une telle conception, catastrophique, de la littérature existe, chez mémé. Évidemment, ça ne donne pas de la littérature, puisque ce n'est pas ça, la langue, la littérature. Qu'un journaliste écrivant des critiques littéraires puisse concevoir ce qu'est "le style", "la langue" comme pourrait le faire un élève un peu perdu de quatrième C, voila qui est effrayant. Le style, ce "truc en plus" ajouté au discours.... On va bientôt avoir droit à la distinction fond/forme ? à la poésie comme onirisme ? à la recherche formelle comme onanisme ?


  Alors, lorsqu'on vante ici tel ou tel (Angot, Adam, Bellanger...) à tort (ou a à raison qui sait), je piocherai à raison (ou à tort, on verra), personnellement pour ma rentrée littéraire chez ceux là : Emmanuelle Pireyre, Mathieu Larnaudie, Claro, Marie Simon, Claire Guézangar, Lancelot Hamelin, Laurent Binet, Patrick Deville, Jérome Ferrari...

Et je suivrai, curieux, les avis des critiques littéraires compétents : ils ne m’intéressent pas tous, ont souvent des goûts différents des miens, mais certains,  y compris dans ces journaux sus-cités, restent des gens ayant au moins une conscience réelle de ce qu'est la littérature, la langue.

Et je relirai mille fois "A quoi bon encore des poètes ?" de Prigent, et "Ma langue est poétique" de Tarkos. Ce que devraient bien faire certains, au moins une fois.




* Rappelons nous, enragés, l'avis de cette dame niaise sur, il me semble, le livre de Maylis de Kerangal, au Masque et la plume ("il n'y a que de la langue", disait elle en substance ....)










lundi 4 juin 2012

Hollande par Depardon

La photo est sortie depuis une heure à peine et les critiques pleuvent. Qu'elles pleuvent. Après tout, l'investiture était trempée, elle aussi.
Je trouve, une fois encore, le travail de Depardon impeccable.
On reproche ou on loue un côté "photo amateur", bêtise. Il y a la sens du cadre, parfait détachement de l'homme devant le palais et simplicité franche. Un genou fléchi, il va de l'avant, dans l'ombre, loin des aveuglements de la lumière de la fonction, du palais. Il laisse la place, ne centre pas l'attention, ne "pose" pas outre mesure, d'où les mains flottantes, l'air légèrement gêné : ce n'est pas Napoléon par David, chacun est à sa place, de l'art officiel non-officiel où l'artiste est à égalité avec le modèle, non assujetti. L'idée du cadre carré, à la Rolleiflex est la meilleure idée depuis le renversement horizontal de Lartigue pour VGE (qui avait fait très fort aussi). Le sombre est là, mais des taches de lumières nous parviennent, l'horizon est souriant, radieux.

Les critiques continueront de pleuvoir, montrant combien le travail exemplaire de Depardon est juste, nécessaire et mal compris.
Crions le haut et fort : "La France" de Depardon est un chef d’œuvre (parmi d'autres merveilles, notamment sa série documentaire "Profils paysans"). Son regard est juste, toujours à bonne distance. Loin de l'idée de la "belle photo" sur un "beau sujet", il détonne et redéfinit notre regard par le sien, en véritable artiste. J'adore cet homme et son travail.

Je suis en train de finir mon prochain bouquin. Il s'appellera "Sombre aux abords". Mon projet était de réaliser ce sera une épopée ordinaire Springsteeno-depardono-ardéchoise  à double face et en 10 chants. Oui, j'ai parfois des idées simples et déjà vues comme ça. Cela pour dire que, pour mon écriture, je me suis véritablement inspiré du travail de Depardon, je ai explicité cela dans les dossiers présentant ce projet. J'ai vu ou revu ses docs, regardé en long et en large sa "France" et j'attends avec impatience "Journal de France" présenté à Cannes sur la réalisation de "La France".

Sur mon manuscrit, je me suis amusé à mettre une photo en première page, pour faire comme si... J'ai bien sûr pris une photo de Depardon, un homme devant un garage. En la recherchant pour ce billet, j'en trouve une autre qui fait un bel écho. J'ai grandi dans un garage, je sais la beauté profonde de ces architectures-là.

Je me sens tellement en accord avec cette façon de voir le monde...
J'ai un rêve, un désir profond, avoir une photo de lui en couverture de ce livre. J'ai regardé sur internet, trouvé sa maison de production, le mail auquel écrire... Mais je n'oserai jamais, trop timide, trop intimidé aussi.

Alors, il peut bien pleuvoir des critiques, quand on a regardé les photos, quand on a pris le temps d'entrer dans son regard, cette photo officielle s'impose dans toute sa force, impeccable. Parfaite.

Félicitations à l'artiste et au modèle qui a su faire le bon choix.

dimanche 13 mai 2012

Sur les braises

Vous le voyez venir ? Les cerises rougissent, le ciel se dégage, il faut tondre, retondre, débroussailler, racler les feuilles, préparer le terrain. On ramasse des brindilles, on enflamme un journal de novembre sur l'affaire DSK, ça flambe et c'est parti, ça sent bon pour la suite.
Wendy Rene aime les barbeucs, et c'est une très bonne idée de chanson, un vrai texte engagé... Mais c'est que Wendy est heureuse, elle aussi de retrouver le sourire, le beau temps après la pluie et les pleurs. Elle est toute chose, chaude avec sa bidoche.

 Et elle remercie, frites à la main, ketchup aux lèvres, light in the attic pour la réédition...

mercredi 9 mai 2012

ouvrez les écoutilles

Dimanche, l'accordéon a fait son retour à Tulle.
Cela peut effrayer.
Mais si vous mettez des lunettes, une jupe informe jaune et des collants rayés à Aurélie Filippetti à côté, cela commence à avoir sacrément de la gueule :
Dark Dark Dark est leur nom. J'avais raté ça, en 2011. J'y suis tombé dessus en écoutant "Hurray for the riff raff" qui mérite aussi une écoute attentive : Allez, zou. Inutile de charger le post, cela suffit.

jeudi 19 avril 2012

Sauvagerie maîtrisée

Les Cowboy Junkies ont toujours mal porté leur nom. Ils sont propres sur eux, ne font pas junkies, ne chantent pas de country. D'où le malentendu, je pense, on les trouve parfois trop proprets. Ils réagissent à ça et proposent souvent des albums décalés, crades comme le précédent, pour briser leur image. Ils tentent des trucs, souvent, et Michael expérimente toujours, très tranquillement. ça donne un groupe à suivre, que je suis depuis longtemps
Le dernier album, le derniers des Nomad series, "The Wilderness" est pourtant un vrai retour aux fondamentaux, calme et mandoliné, sans expériimentation. PAs de rap, de musique chinoises, de guitares étranges, du junkies à la papa.
Mais il n'a rien de pantouflard, ils rentrent juste du monde extérieur où on se les pèle, et veulent juste se mettre un peu au chaud.

On se sent alors comme à la maison, avec un de leurs meilleurs albums.

Le meilleur à la fois depuis pas si longtemps car le retour en forme n'est pas nouveau (Renmin park c'était 2010, At the end of path taken, 2006)et à la fois depuis très longtemps car il est du niveau de "Lay it down" 1996 ou "The Caution Horses" 1989.

Le seul regret, celui que j'ai toujours, c'est de ne pas voir pointer d'album solo de Michael qui, avec sa voix plus imparfaite, pourrait sortir, il en a les moyens, un des meilleurs albums qui soient, qui change un peu des C.J. traditionnels sans avoir besoin d'aller tenter le diable ailleurs que dans le périmètre où il excelle.

Autre idée, si, au lieu de s'entourer de gros bourrins à la production, le père Springsteen demandait à ces gars, fans intelligents, de produire son prochain, ce serait son "Oh Mercy", ou son" American recordings".

L'album est en écoute notamment sur leur site, sans pub, à droite.

Grand songwriting, grande chanteuse, grands musiciens :

dimanche 15 avril 2012

Tout est bon dans le cochon de l'espace !

Allez, zou, on s'y remet !

Je reparlerai de ciné et de littérature un de ces quatre, si c'est un matin, ou un après-midi, ou un soir ou une de ces quatre, si c'est une nuit.

Mais, j'accumule pas mal de trouvailles musicales, il faut bien poster ça, parce que la merdouille envahit tout pendant ce temps.

Alors, on commence par un gars tout malingre. L'anti-star.
Il a le prénom d'un grand dadais pince sans rire et le nom d'un créateur de muppets, muppets comme on peut en trouver sur certains de ses formidables clips.

Keaton Henson.
Il est tout timidou, avec sa guitarounette. Il ferait presque pitié.
Puis il chante, et alors, c'est l'effet AIRWICK en grand écran, la pièce s'aère, prend tout l'espace et se gonfle de vent : Bon sang de bois, le petit gars tout mou a du talent à revendre en surstock sur lebonplanqu'ilestbon.fr!

L'album, "DEAR", autoproduit, est apparemment sorti en 2010, il ressort en grand ces jours-ci. Je l'ai pris chez Play à 10-11€, c'est à peu près ce qu'il coûte ailleurs aussi.
Il est fabuleusement bon, vous pouvez y aller les cocos.


Ah, oui, hein ! ça calme, n'est-il point ? Si je reviens après 4 mois, ce n'est pas pour défendre de la cagade !